Icône de la maison Cartier, la Santos est une pièce marquante dans l’histoire de l’horlogerie. La première montre-bracelet s’amuse à nous faire remonter le temps cette année avec la Rewind.
D’une incroyable modernité, les collections Santos de Cartier et Santos-Dumont sont issues d’une fulgurance créative des équipes de Louis Cartier en … 1904 ! Mieux, ces montres sont les dignes descendantes de la première montre-bracelet inventée par la maison pour le pionnier de l’aviation, ô combien célèbre, Alberto Santos-Dumont. Même s’il pilotait en costume de ville, coiffé d’un chapeau melon, la cravate soigneusement nouée, Alberto Santos-Dumont reste une grande figure de l’aviation. On lui doit, entre autres, le premier vol public réussi en octobre 1906. Il faut dire que s’élancer à bord de ces extraordinaires machines demandait une belle dose d’inconscience mais surtout un sens aigu de la technique… La folle épopée de l’aviation entraînera bien des découvertes et des avancées jusqu’à celle… de la montre-bracelet.
Rencontre à l’ACF
C’est à l’Aéro-Club de France que l’aviateur brésilien s’ouvre aux frères Cartier, Louis et Pierre, de l’avantage qu’il y aurait à pouvoir lire l’heure, sans avoir à lever une main des commandes de son avion. En cela, il préfigurait une autre invention qui modifiera le rapport au temps, celle de la montre-bracelet. Cette montre, les dessinateurs de Cartier l’imaginent en s’inspirant de l’architecture métallique de Monsieur Eiffel, conciliant fonctionnalité et nouvelle esthétique, avec son verre protégé comme les hublots d’un cuirassé et sa couronne encastrée dans la boîte. Autant d’idées reprises dans les années 70 par de nombreux designers horlogers dont le célèbre Gérald Genta… Mais qu’importe. La collection 2024, loin d’être tournée vers le passé, démontre que le studio de création de Cartier d’aujourd’hui est bien digne de ses prédécesseurs. La collection actuelle, facile à porter en toutes circonstances, s’articule autour de la ville et du sport. À la trois aiguilles en acier, disponible en deux tailles, L et XL, s’ajoute cette année une très belle version munie de deux fuseaux horaires et équipée d’un mouvement mécanique automatique de dernière génération.
Quick Switch, quel bonheur !
Avec son bracelet métallique aisément interchangeable, le système breveté Quick Switch, son propriétaire bénéficie de « deux-montres-en-une ». Sur cuir, elle se veut plus urbaine et rappelle la montre originale de 1904 ; sur métal, elle se prête à toutes les aventures, dans les airs (avec une résistance au magnétisme jusqu’à 1200 G) ou en mer (avec une étanchéité à 10 bars soit 100 mètres). Elle sera très confortable sous toutes les latitudes avec son système d’ajustage de la taille « au maillon près » ou « smart link ». Redessinée subtilement en 2018, la Santos évolue dans le respect de ses codes d’origine. La lunette en particulier est plus fine et plus élancée, ce qui accentue le dynamisme stylistique de la montre. À l’observer de plus près, on ne peut que célébrer le génial coup de crayon de Cartier en ce tout début du XXe siècle. En acier, or et acier ou tout or, la Santos incarne un esprit unique, celui des pionniers de l’aviation bien sûr mais aussi celui d’un siècle dont l’aube laissait présager plus de progrès et d’inventions que le monde n’en avait jamais connu.
Les Santos-Dumont issues de la collection Cartier Privé représentent l’expression la plus sophistiquée du modèle, tant d’un point de vue horloger, avec le calibre à remontage manuel (230 MC) que joaillier, le boîtier se parant d’une lunette revêtue de laque. Platine et laque vert olive, or jaune et laque gris taupe ou encore or rose et laque bleu paon, chacune est montée sur des bracelets en cuir d’alligator assortis. À noter, la pièce en platine est une édition limitée à 200 exemplaires pour le monde. Série limitée également pour la « conversation piece » de la collection, la Santos-Dumont Rewind en platine que le génial aviateur aurait adorée ! L’affichage de l’heure est ainsi inversé et les aiguilles tournent en sens contraire à celui de toutes les montres. Avec son cadran en cornaline, son bracelet en alligator semi-mat marron, ses chiffres romains inversés et la signature de son protagoniste gravée comme si on la lisait dans un miroir, elle est la montre de collection parfaite, limitée elle aussi à seulement 200 exemplaires pour le monde. Une pièce à laquelle on prendra goût comme toutes les Cartier aujourd’hui détentrices de records réguliers dans les grandes ventes internationales, que ce soit à Genève, Londres ou Hong Kong. Jalon essentiel de l’histoire de l’horlogerie, la Santos a connu un succès fulgurant dès sa commercialisation en 1911 puis à son relancement en 1978. Quant à « la Santos 100 », l’édition centenaire lancée en 2004, elle mérite le titre de « montre du siècle », tant elle a su être de toutes les époques avec la même pertinence. L’on peut dire, sans se tromper, qu’elle fait partie de ces très rares objets sur lesquels le temps n’a pas de prise. Un comble pour un instrument destiné justement à le mesurer.
François-Jean Daehn